« Qu'elle est mignonne ! Comment elle s'appelle ? » « Nevada. », répondit fièrement ma mère. La dame qui se tenait à côté d'elle fit son possible pour masquer sa surprise, sans succès. Nevada n'était pas un prénom, c'était le nom d'un état. Celui où je suis née, plus précieusement. Quelle originalité ! Encore heureux que je ne suis pas née dans le Massachusetts ou dans Wisconsin, je les aurais détesté pour le restant de mes jours. Le plus drôle, dans cette histoire, c’est que je n’ai jamais vécu dans le Nevada. Ma mère a accouché là-bas mais ma famille est originaire de Phoenix et c’est là-bas que je vis depuis que je suis gosse. Arizona aurait sans doute été un prénom plus approprié.

Je suis la cadette d’une fratrie de quatre enfants. Il y a eu Noah, qui a aujourd’hui 27 ans, puis Nathaniel, 25, Nick, 23 et moi, la petite dernière. Non, vous ne rêvez pas : je suis la seule fille. Et oui, mes parents sont obsédés par la lettre « N ». Ne me demandez pas pourquoi, je n’en sais rien et je n’ai jamais voulu le savoir. Bref. Grandir entouré de trois mecs n’est pas si terrible qu’on pourrait le penser… Mes frères sont souvent sur mon dos et ils passent leur temps à me charrier et à vouloir me rendre dingue mais ils sont toujours là pour me protéger et je sais que je peux compter sur eux en cas de problème. Nous avons toujours été proches et la famille est primordiale. Aujourd’hui, même si nous ne vivons plus ensemble, nous essayons de nous voir tous ensemble au moins une fois par semaine. La famille, il n’y a que ça de vrai.

Parmi les personnes importantes de ma vie, en dehors de mes frères et de mes parents, il y a Jolene. Enfin, il y avait Jolene. Ce n’est pas qu’elle ne compte plus pour moi, c’est juste que nous avons pris deux chemins totalement différents et que notre amitié fait partie du passé. On s’est rencontrée il y a quatre ans. J’entrais à l’université et même si je ne quittais pas l’Arizona, je voulais marquer le coup en abandonnant la maison familiale. La volonté de devenir indépendante, l’envie de voler de mes propres ailes … Vous voyez ce que c’est ? J’ai trouvé un appartement sympa mais je ne pouvais pas payer le loyer toute seule, même en cumulant deux petits boulots en complément de mes cours. Alors j’ai mis une annonce pour trouver une colocataire et Jolene est arrivée. Au fil des semaines, on est devenue les meilleures amies du monde et tout allait bien dans le meilleur des mondes. Puis elle s’est entichée d’un mec, elle n’avait plus que son nom à la bouche et elle a décidé de partir vivre avec elle. La dernière conversation qu’on a eue s’est très mal terminée et on ne s’est pas revue depuis. Ça fait plus d’un an. Et même si elle me manque, je ne ferais jamais le premier pas pour renouer le contact. C’est elle qui est en tort, pas moi ! Si elle veut mener une vie paisible et rangée, tant mieux pour elle. Moi, j’ai déjà connu ça et pour le moment, je veux juste m’amuser et profiter sans me prendre la tête. À quoi bon vivre une relation sérieuse et se donner corps et âme à quelqu’un si c’est pour se faire plaquer quelques années plus tard ? Vous vous dîtes sûrement que ça sent le vécu… et vous avez raison. Je n’ai connu qu’une seule vraie histoire mais je crois que ça m’a vaccinée de l’amour pour un bout de temps. Après ça, j’ai laissé mes rêves de Prince Charmant et d’amour éternel au placard. Maintenant, je profite et je ne me mets plus de limites. Je sors, je bois, je fume, je fais la fête… En fait, je fais ce que je veux, quand je le veux. Je ne veux pas arriver à soixante ans et regretter de ne pas avoir assez profité de ma jeunesse.