Elle me tape sur le système. J'la regarde tiré nerveusement sur sa clope, recrachant à intervalle régulier une fumée grisâtre. Elle va me faire péter un câble, et ensuite elle ira se planquer dans notre chambre en chialant. J'me mords violemment la lèvre, résistant à l'envie de m'approcher d'elle, au risque de me prendre un coup. Miléva, c'est une violente. Et je sais c'que je dis. Je sais que là bas, en Russie, elle a été diagnostiquée démente, et "soignée" dans un hôpital psy' à coup d'électrodes, de médicaments tous plus foireux les un que les autre. J'sais pas trop comment elle a réussi à s'échapper de cet enfer, comment elle est arrivé ici, tout ce que je sais c'est qu'elle en a garder des séquelles. Et même de foutues séquelles. J'ai l'impression que son séjour en psy' ne l'a pas arrangée, ma pauvre Miléva. C'est une véritable tigresse, prête à bondir dès qu'elle se sent menacée. Elle commence à me parler, à m'attaquer encore une fois sur ma solitude. Elle est trop contente de se dire qu'elle est la seule que je fréquente, la seule que j'aime. Complétement névrotique, la jolie poupée russe. Elle lève sur moi un regard agressif, prête à en découdre si jamais j'me décide à lui en foutre une. Ce qui devrait pas tarder, si elle continu à me faire chier comme ça. J'me lève, vais chercher dans notre chambre la poudre blanche magique et reviens m'installer sur le canapé défoncé. Miléva me regarde tracer mes rails à coup de carte de visite, avec une lueur gourmande dans les yeux. J'ai un léger sourire en la voyant se pencher en même temps que moi sur le rail que j'ai préparé pour elle. Je me redresse avant elle, observant son cou dénudé et frêle, ses cheveux bruns frôlant la table basse. Finalement, elle relève son visage vers moi, un large sourire aux lèvres. Je lui tend une main, qu'elle saisit, et l'attire contre moi. Je m'assois sur le canapé et installe Miléva sur mes genoux, passant mes bras autour de sa taille maigre, la serrant contre moi. Je pose mes lèvres sur les siennes. « Je t'aime, Miléva... » « Делайте меня мир, Aloïs... fous-moi la paix, aloïs... » Comme d'habitude, mon amour, comme d'habitude...