Assis à mon bureau, la tête entre les mains, je relisais encore les différents articles que les employés m'avaient fait parvenir. J'avais laissé à mon associé le soin de sélectionner ceux qui seraient retenus pour le journal du sur-lendemain, préférant laisser mon attention sur ce que m'avaient pondus les ''stagiaires''. Depuis quelques temps, le Journal recrutait des journalistes, certains tout droit sortis de l'école major de leur promo, d'autres venant de je ne sais où mais étant fortement conseillé. Pour une première, ils avaient eu droit à tout ce qui se trouvait dans la rubrique des chiens écrasés. A proprement dit, tout ce qui était complètement insignifiant par rapport à l'actualité. Le sujet en lui-même n'était pas intéressant, ce qui fait que c'était une excellente chose pour regarder le côté rédaction, talent. Tout le monde dans le domaine passait par là, mais après avoir passé plusieurs heures à regarder sérieusement chaque article, une seule chose en ressortait : trouver de bon éléments devenait de plus en plus compliqué. Les trois quarts de ces articles étaient complètement incompréhensibles, à croire que c'était fait exprès. Je rangeais tout dans un dossier, dans un ordre approximatif de ce qui valait le coup d’œil ou non. Je reprendrais ça dans l'après-midi sûrement. Je me levais pour mettre tout ça dans l'armoire, ne pouvant que constater l'état bordélique ce celle-ci. Il fallait vraiment que je prenne du temps pour tout mettre en ordre. Quitte à rester une heure de plus ce soir, je le ferais tant pis, parce que à ce rythme, ça allait devenir de plus en plus ingérable. Je m'approchais de la vitre, observait Phoenix qui s'étendant à ma vue. Les locaux étant situés dans un grand bâtiment, à la limite du gratte-ciel, c'était bien l'un des avantages que l'on pouvait y trouver : la vue. Malgré tout, mon boulot n'était pas d'observer ce qu'il se passait à l'extérieur, alors je me détournais pour aller regarder mes mails. Comme d'habitude, je n'en manquais pas, malgré le fait que même pas la moitié ne me soit vraiment utile. J'étais peut-être vieux jeu sur le sujet, mais je préférais encore la paperasse, par rapport à l'informatique, auquel je ne faisais pas confiance.

Midi étant passé depuis déjà un petit moment, je décidais d'arrêter là pour ce matin avec les dossiers inutiles, et plutôt faire quelque chose d'urgent et d'un minimum digne d'intérêt. Je n'avais pas tellement faim, et au vu des nuages qui menaçaient au dessus de Phoenix, j'en arrivais à la conclusion que le temps ne serait pas de la partie, alors faire une pause pour le repas n'était pas d'actualité. Il me fallut ça pour réaliser que j'avais tout laissé dans ma voiture. Donc que j'étais obligé de descendre chercher tout ça. Au moins je ne risquais pas de croiser grand monde. Je sortais de mon bureau, fermant juste la porte derrière moi. Les locaux me semblaient presque vides à première vue. Je ne m'y attardais pas, ralliant le parking de la société pour récupérer ce qu'il me manquait. A peine eus-je remis le nez dehors, que je me prenais le douche. Wahou...Je sentais l'averse venir, mais pas à ce point. Visiblement je n'étais pas le seul à ne pas m'être équipé contre ça, pensais-je en apercevant une silhouette assise sur un banc plus loin. Silhouette qui, au fur et à mesure que je me rapprochais, me semblais bien familière, même si elle n'avait aucun raison d'être là. Je devais me tromper. Mais plus je m'approchais, moins le doute se faisait possible. Je n'étais plus très loin de lui, mais je m'arrêtais quelques instants, interloqué. Je n'étais pas mécontent de le voir, loin de là, mais c'était bien la dernière personne que je me serais attendu à voir devant mon lieu de travail, qui plus est sous la pluie. Enfin bon, maintenant qu'il était là, je pouvais bien en profiter...Il ne m'avait pas vu, aussi je passais discrètement derrière le banc pour le suspendre. Je posais ma tête contre son épaule et demandais, amusé. « C'est moi que tu cherches ? » Tout ce qui tournait autour des effusions auraient lieu plus tard, parce que trempé comme il l'était, il finirait par prendre mal, et on aurait tout gagné. Je ne lui laissais pas vraiment le temps de rouspéter contre ma façon de me manifester, que je me redressais en désignant la pluie qui s'en donnait à cœur joie. « Je voudrais pas t'apprendre quelque chose gamin, mais...La pluie, ça mouille. Viens plutôt te mettre à l'abri. » Je ne lui laissais pas tellement le choix, même si je savais qu'il ne se ferait pas prier.

Le sachant sur mes talons, je retournais vers l'entrée du bâtiment. Le garde de l'entrée nous dévisagea un moment, mais je lui lançais un regard noir qui n'autorisait aucune réflexion. D'accord, si Ewen n'avait pas pu entrer, c'était un peu de ma faute, pour deux raisons. D'une, j'avais complètement oublier de lui laisser mon numéro ou quoi que ce soit la dernière fois que l'on s'était vus, et de deux, je prônais le fait que je ne voulais pas que les personnes me réclamant puissent entrer librement. Simple mesure de sécurité et de...tranquillité contre tous ces pigeons qui me prenaient du temps inutile. « Mis à part le fait que tu es trempé, ça va toi ? » C'était peut-être la question basique d'usage, mais je la sortais plus pour combler le silence. Je ne voulais pas paraître muet, mais dans les couloirs et au milieu des employés, je n'avais pas trop envie de discuter avec le jeune homme avec des oreilles qui traînent. Je m'arrêtais juste au niveau de la secrétaire pour la prévenir que sauf urgence, je ne voulais pas être dérangé, puis je me dirigeais vers mon bureau, encourageant Ewen à me suivre. On y serait mieux. J'entrais dans le pièce, refermant la porte derrière lui. Peut-être que cette pièce n'était pas le meilleur endroit possible pour passer un peu de temps avec lui mais ça ferait largement l'affaire. Un autre des atouts de la pièce était sa grande taille, dont j'avais profité pour installer un canapé et des fauteuils autour d'une table basse, dans un côté de la pièce. Ça en faisait un endroit pas trop désagréable. Je posais la paperasse que j'avais sur le bureau, et encourageais le jeune homme à se mettre à l'aise. Je lui souris, conscient de paraître un peu froid une fois que j'avais passé le seuil de mon lieu de travail. Mais très vite, je fis mine de prendre un air mécontent, secouant la tête. « C'est malin, tu vas finir par choper la crève...Je ne serai pas contre l'idée de venir te border quand tu seras cloué au lit, mais quand même. » Il fallait vraiment que j'apprenne à rester sérieux moi. Même s'il n'y avait pas vraiment de raisons de l'être. J'étais agréablement surpris de le voir, étant donné que rien ne l'obligeait à tenter de me voir. Je ne savais toujours pas quoi en penser d'ailleurs. Ce petit me plaisait, mais d'une façon...que je ne comprenais pas. J'avançais un peu dans le brouillard, ne sachant pas du tout à quoi tout ça mènerait. Et si pour moi, ce n'était pas clair, je ne préférais même pas imaginer de son côté. « Je suis content de te voir. » Je n'allais pas épiloguer, c'était le principal dans l'histoire.

Même si je ne voyais pas vraiment ce qu'il pouvait faire là, j'étais quand même bien satisfait de cette petite visite à l'improviste. Avec d'autres, le fait qu'ils attendent sous la pluie ne m'aurait pas importé plus que ça, mais là, je trouvais juste ça touchant. Heureusement pour lui que j'avais oublié ce fichu dossier dans ma voiture, parce que sinon, le pauvre aurait poireauté un bon moment encore. A voir Ewen trempé de la sorte, j'en arrivais vite à la conclusion qu'il était là depuis quand même un bon tas de minutes. Enfin bon, maintenant, j'étais là, donc ça ne serait pas une de plus. Je hochais négativement la tête quand il s'enquit de savoir s'il me dérangeait. Pas le moins du monde. Parce qu'à vrai dire, il était la chose la plus intéressante qui me soit arrivé de la journée, peut-être même de la semaine tiens. Je ne savais pas tellement ses disponibilités, donc ses moments de libre pour qu'on puisse se voir, alors je comptais bien profiter de lui aujourd'hui. Comme d'habitude, je ne fus pas étonné de l'entendre rouspéter à l'évocation du petit surnom que je lui donnais...Maintenant que je lui avais attribué, il pouvait encoure courir longtemps avant que je perde cette habitude. Je lui ébouriffais les cheveux en rigolant de son désarroi. « Si je veux. »

Je me redirigeais vers le bâtiment, ayant invité Ewen à me suivre. Je fus quand même surpris de le voir me suivre à la trace, ne me décollant que très peu. Il est vrai que j'avais perdu l'habitude d'être impressionné par l'intérieur du Journal, avec les bureaux et les employés qui, je devais bien le dire, grouillaient un peu de partout. C'était devenu tellement habituel pour moi que je n'y faisais même pas attention. Je savais tout à fait que la plupart des employés simulaient un travail intense dès que je passais, puis ça me faisait toujours rire pour certain. On voyait le travail final, comprenait vite. Je jetais un coup d'oeil amusé au jeune homme qui n'avait pas l'air décidé à s'éloigner de moi pour le moindre prétexte, et je réalisais que ce n'était pas trop le moment de faire ma mauvaise langue sur les employés. Son air gêné était quand même craquant....et ça aussi, ça faisait parti des pensées que je devais garder loin de mon esprit. Je prenais donc des nouvelles du gamin, histoire de détendre un peu l'atmosphère. « Ça va merci. Et toi, comment ça va ? » Mis à part une matinée éreintante à lire des torchons, très bien...J'hésitais pendant un instant à sortir une phrase assez stéréotypée du genre 'mieux maintenant que tu es là', mais définitivement, j'allais éviter. J'avais le don pour mettre le jeune homme mal à l'aise, et ce malgré moi, alors si je commençais avec mes bêtises, on n'en avait pas fini. Quoique bêtise...Pas vraiment. Sur le coup, il éclairait vraiment ma journée qui s'annonçait ennuyante à souhait. Je hochais la tête, trouvant cela moins idiot que de répéter que ça allait. Puis si lui il allait bien, c'était le principal.

Enfin bref. Bien décidé à profiter un peu de sa présence à l'abri des regards indiscrets, je me dirigeais tout simplement vers mon bureau. Il fallait bien qu'il sèche un peu aussi. Sitôt entré, et le dossier posé, je l'avais bien taquiné avec ça, mais ça m'aurait vraiment embêté qu'il prenne mal. En profiter pour lui tenir compagnie ne m'aurait pas déplu mais bon, pour ceci, on trouverait d'autres occasions. Cependant, ma plaisanterie semblait le gêner plus qu'autre chose...A moins que j'hallucine ? Quoique en soit, il n'avait pas l'air d'être à l'aise ici. Pour l'instant. Je l'invitais à s'asseoir, m'amusant de la façon dont il essayait de retenir les gouttes d'eau qui s'échappaient de ses cheveux, leur donnant un air indiscipliné que je trouvais plutôt sympa. « Je suis désolé, d’être venu sans te prévenir… » Et encore qu'il s'excusait. Je pensais lui avoir déjà dit d'arrêter avec ça, surtout étant donné que tout à l'heure, j'avais répondu négativement quant à savoir s'il me dérangeait. « T'as pas à être désolée, en plus je t'avais dit d'arrêter...Mais t'as pas à t'en faire, j'aime bien les surprises, surtout quand elles sont aussi agréables. » Clin d'oeil taquin. Prévenu ou non, ça ne changeait donc rien. Puis dans le pire des cas, c'était Ewen. Rien que pour cette raison, je ne pouvais pas lui en vouloir. Puis de toute façon, si je lui en avais tenu rigueur, je n'aurais pu m'en prendre qu'à moi-même, vu que je ne lui avais laissé aucun moyen de me joindre. Ce qui serait remédié dans les minutes à suivre, vu que je me levais pour attraper une carte de visite vierge afin d'y inscrire mes coordonnées. J'aurais pu lui donner ma carte de visite, tout simplement, mais ça manquait clairement d'intimité. Et puis de toute manière, c'était surtout des coordonnées professionnelles, dont je ne m'occupais que très rarement. Aucun intérêt au fond.

Je m'apprêtais à m'installer près d'Ewen, en lui disant clairement que j'étais heureux de le voir. La stricte vérité, même si je n'avais pas eu trop l'air de le montrer pour l'instant. Je réalisais ensuite que le jeune homme étant plutôt...timide dans son genre, j'allais peut-être juste réussir à lui faire piquer un fard...Ah non, il baissait la tête pour se mettre à marmonner, incompréhensible. Dommage d'ailleurs, je trouvais ça mignon quand il se mettait à rougir moi. Mais je m'égarais. Je crus entendre un ''aussi'', ce qui me coupa dans mon élan. Est-ce que j'avais bien compris.. ? Je restais debout à le regarder, interloqué. Je n'avais pas été habitué à le voir étaler ce genre de choses. Quoique à voir son air gêné, et ô combien craquant -bien que je taise ce détail-, je n'avais pas l'impression de m'être trompé. Et une éventuelle réponse telle que '''moi aussi'', me ravissait totalement. J'eus quand même la présence d'esprit de poser vers lui le papier avec mes coordonnées avant de me mettre à fondre devant ce gamin qui réussissait malgré lui à m'attendrir. J'avais toujours évité de m'attacher, mais dans le cas présent, c'était bien contre mon gré. Rien que pour cette raison, je tentais tout de même de ne pas céder. Sinon...Non en fait, pas de sinon, ou je n'allais jamais m'en sortir avec ce genre de dilemme. Je savais juste que je ne ferai rien qu'Ewen ne veuille pas, point à la ligne.

D'ailleurs celui-ci semblait chercher un échappatoire, en se remémorant l'existence de sa boîte en plastique...à laquelle j'avouais volontiers n'avoir prêté aucune attention jusqu'ici. Jusqu'à ce qu'il se lève et me la tende à bout de bras...Il avait peur que je le morde ? « Tu as surment beaucoup à faire, désolé… Je voulais juste venir t’apporter ça » Mh ? Je pris le tupperware avec un regard interrogateur. Je murmurais un remerciement, en ouvrant ce qu'il m'avait tendu. L'odeur de chocolat me monta aux narines, et je ne mis pas bien longtemps à identifier ce qui se trouvait à l'intérieur. Notre dernière entrevue me revint en tête, et je me mis à sourire, à la fois amusé et attendri. Il était trop mignon...C'était donc ça, le fameux brownies maison d'Ewen ? Mh. En fait, il était venu, et avait patienté sous la pluie au risque de prendre froid, juste pour ça ? En temps normal j'aurai trouvé ça stupide, mais là, ça aurait été difficilement plus attendrissant. Je relevais les yeux sur le jeune homme, qui semblait décidé à regarder tout sauf moi à croire. « Merci gamin...J'ai quand même hâte de pouvoir te dire si ton brownies est aussi bon que tu le prétends. » Je marquais une pause. Quand il s'agissait d'être adroit avec mes mots, face à lui, ça devenait tout un pataquès. J'arrivais vraiment à m'emmêler comme le derniers des débutants en la matière...Je repris, un peu plus sûr de moi. « Tu es bien plus intéressant que ce que j'ai à faire. Si tu veux rester un peu, je dis pas non. » Ce qui se traduisait facilement par un refus clair et net de le laisser filer maintenant. Je pourrai même le raccompagner plus tard, s'il voulait. Enfin ça, c'était surtout une excuse de plus pour rester un peu avec lui.

Visiblement, donner mon numéro à Ewen ne semblait pas être une mauvaise idée. Son sourire, bien que discret, disait même tout le contraire. Alors après, oui, peut-être que je l'observais de trop, mais c'était malgré moi. Avec mon boulot, l'observation était une qualité essentielle si l'on ne souhaitait pas passer à côté de plein de choses. Peut-être qu'à l'instant présent, je n'étais pas en train de travailler, mais...je ne pouvais pas m'empêcher de constater qu'il était pas désagréable à regarder, le gamin. Loin de là même, bien que ça ne soit pas du tout la question pour le moment. M'enfin, à l'instant présent, je me satisfaisais à savoir que si l'envie le prenait de nous revoir, autrement qu'en poireautant devant mon lieu de travail sans que je le sache, il savait désormais où me joindre. Le soir de notre rencontre, tout avait été bien différent. Pour moi, ça pouvait à la base juste être un mec parmi tant d'autres, bien qu'un peu plus discret et timide. Mais aujourd'hui, je ne tenais pas vraiment à me montrer envahissant ou gênant à son égard. Ça m'amusait de penser qu'il avait vraiment fallu peu de temps pour qu'il se mette à mener le jeu. Libre à lui de l'arrêter, même si je ne voulais ça pour rien au monde. Peut-être que c'était égoïste d'avoir envie de le garder pour moi, sauf que justement, ce n'était qu'une envie. Il était assez grand pour faire comme bon lui semble. Il pouvait juste être certain que si quiconque osait lui faire du tord, cette personne aurait du souci à se faire. La violence, c'était pas tellement mon truc, mais s'il fallait mettre les points sur les i avec certains gens, trop attardé pour le comprendre, j'y voyais aucun inconvénient.

Enfin bref, penser à ce genre de choses ne servait à rien, car ce n'était heureusement pas d'actulalité...Du moins, à ce que je sache. Ewen avait l'air en parfaite forme de toute manière, même s'il était trempé jusqu'aux os. Par simple mesure de respect, je n'en profitais pas pour le réchauffer un peu, mais je n'aurais pas été contre. Ce n'était pas la question, et puis en plus, le jeune homme choisit ce moment pour quitter sa place et me tendre ce pour quoi il était venu, réveillant ma curiosité. A peine la boîte entrouverte que l'odeur du chocolat vint me chatouiller les narines. Il m'avait parlé brièvement de ses talents culinaires, surtout en ce qui concernait les brownies, mais je ne me serai pas imaginé qu'il puisse prendre la peine de venir jusqu'ici, ce qui -entre le gardien, la pluie, et tout le tralala- ressemblait quelque peu à un concours du combattant. Attendri, je le remerciais, me demandant à haute voix si ce fameux dessert valait bien toutes ces éloges. Je relevais les yeux sur lui, presque déçue qu'il ne réagisse plus à ce petit surnom qu'était gamin...Zut. J'allais devoir trouver autre chose pour le taquiner alors. De toute façon, il était vrai que par rapport à moi, c'était un gamin. Pas de beaucoup, vu que j'étais loin de me considérer comme vieux, mais même.

« Tu peux en goûter un peu » Il me prenait par les sentiments là. Mon ventre semblait aussi être de cet avis, gourmandise oblige. Ewen devait vraiment être pressé d'avoir mon verdict, ce qui me fit sourire un peu plus. Je jetais encore un coup d'oeil sur le contenu du tupperware, notant au passage le nombre de parts qu'il m'avait apporté...J'étais peut-être gourmand, mais aussi raisonnable, avec un appétit normal. Aussi, je voyais mal comment je m'y prendrai pour engloutir toutes ces parts. Il avait qu'à m'aider tiens. « Seulement si tu en prends aussi. Des fois que tu ais mis quelque chose dedans... » Bien sûr, c'était une pure boutade, destinée à le faire réagir. On ne voyait ça que dans les films, des choses louches dans les mets. Puis bon, en général, il fallait vraiment avoir une dent contre la personne. A force de lire plusieurs fois par semaines des articles de critique sur les derniers films du moment, autant dire que ce genre de scénario revenait bien souvent. Aussi souvent que les histoires d'amour dégoulinantes en fait...Vive les boîtes de production américaines. Même s'il ne l'avait pas dit, j'avais senti qu'il avait peur de déranger, alors j'en profitais pour lui demander de rester un peu, allant même jusqu'à lui avouer qu'il était bien plus intéressant que tout ce que j'étais censé faire en cette après-midi. Un de mes défauts, j'avais toujours eu tendance à être facilement distrait. Quand on avait la chance d'être en aussi charmante compagnie aussi, le choix était vite fait.

Comme je m'y attendais, le jeune homme sembla hésiter un moment, ce que je comprenais tout à fait pour plusieurs raisons. Manifestement, jauger l'extérieur, et la pluie qui se déversait sans relâche, eut la raison sur son avis. Il faut avouer que le temps était vraiment pourri, par rapport à la matinée...Mais je préférais que ça tombe pendant que j'étais au bureau, sans aucune obligation de sortie en extérieur, plutôt que durant une de mes journées de libre. C'est à dire, pas forcément le week-end. Mon boulot m'obligeait à bosser un peu partout, un peu à n'importe quelle heure, mais dans le fond ça me plaisait. Il me faudrait peut-être quelques années pour me lasser, et dans ce cas, je changerai de voie. Vu que ça concernait le journal familial, il faudrait peut-être que je voie ça avec Evan. Et reprendre contact avec mon frère ne m'enchantait pas, mais alors pas du tout. Je ne voyais même pas pourquoi j'y songeais. Il y avait le temps, si cela devait arriver. Si tout ça avait été à refaire, je l'aurais refais sans hésitation, alors y songer ne me menait à rien. Je me concentrais sur Ewen, qui semblait bien méditer la question de rester ou non. « Euhm…Je veux bien rester le temps que la pluie se calme un peu » Juste le temps que la pluie se calme un peu ? Han. Je me surpris à espérer qu'elle ne se calme pas avant un moment du coup. La météo avait de plus prévu de violentes averses jusqu'en fin de soirée. Qu'il ne change pas d'avis, moi ça me convenait. Et puis prendre l'excuse de la pluie, c'était minable aussi. S'il n'avait pas plu, il ne serait donc pas resté ? Quoique s'il n'avait pas plu, je serai sorti entre midi et deux, alors je doute que se serait vu au final...Brave pluie. D'un autre côté, je pouvais comprendre qu'il ne se sente pas à son aise ici. Et si ça se trouve il avait des choses à faire...Dans ce cas là, j'aurai l'air d'un sacré égoïste. « Ils ont prévu une forte pluie jusqu'à la fin de soirée. T'es toujours sûr de toi ? » Je me mis à sourire, amusé de ma propre connerie. Néanmoins,je voulais bien rester avec Ewen jusqu'à ce soir...Je suis sûr qu'on trouverait de quoi s'occuper.

Mais à ce moment présent, cela ne semblait pas être le problème principal d'Ewen, qui avait le regard consciencieusement fixé sur ses bras croisés, ou plutôt sur son torse...Je suivis son regard, curieux de voir le problème. Ah oui. Le tee-shirt blanc, c'était pas une très bonne idée pour aujourd'hui. Enfin bon, charmant spectacle qu'était le tee-shirt, indécemment plaqué et transparent collé contre le torse de son propriétaire, je n'avais aucune raison de me plaindre. Je n'abusais pas non plus, car au vue de la jolie teinte rosée qu'avaient pris les joues du jeune homme, la situation devait lui paraître bien gênante, alors qu'il n'y avait absolument pas de quoi. Je réfléchis quelques secondes, histoire de déterminer si c'était dû à une éventuelle pudeur, ou tout simplement à moi. Je ne fis pas de commentaire sur le sujet, faisant même mine de ne rien avoir remarqué. Je posais le tupperware sur la table basse, prenant juste le temps d'aller chercher des serviettes en papier pour le brownies. L'avantage de manger au bureau, c'est qu'à force, par simple prévoyance, on a tout le nécessaire. Je me rasseyais près de lui, quand il lança une question qui visiblement, le taraudait depuis tout à l'heure. « Il y a combien de gens qui travaillent pour toi ? » Uhuh...Bonne question. A vrai dire, je ne savais pas trop. Il y avait énormément de personnes, répandus dans divers services. La rédaction, et l'impression par exemple. Pour les citoyens, il était normal de se retrouver avec chaque jour le journal dans leur boîte aux lettres, comme par merveille. Mais derrière, c'était un boulot monstre, qui nécessitait parfois de s'y prendre la veille pour le lendemain dans l'actualité importante, et pour d'autres, qui se traitaient une semaine à l'avance. D'un côté ou de l'autre, les rouages de l'entreprise marchaient d'une façon bien plus complexe que ce que beaucoup pouvaient penser. Surtout qu'il fallait superviser le tout, et veiller à ce qu'il n'y ait pas trop d'informations erronées. Malheureusement, cela arrivait bien plus souvent que je l'aurais voulu. Les journalistes ne peuvent pas toujours s'exprimer librement, censure oblige. Et quand ils le peuvent, il y a toujours des moments où ils ne peuvent pas s'empêcher de ramener leur grain de sel. On ne peut pas toujours repasser derrière et demander à ce que ce soit refait alors voilà...A y songer ainsi, les bureaux du journal avaient des allures de fourmilière géante. Mais pour répondre à la question, quant à savoir le nombre d'employés...Joker. « Hum...Pas mal. Pour pas te mentir, je ne connais pas le nombre exact...Il y a plusieurs parties dans le journal, qui comportent chacun un certain nombre d'employés, et d'un autre côté, je ne travaille pas seul, j'ai des associés. Et comme du côté des journalistes, le nombre n'est pas toujours très stable... » Je fronçais les sourcils. Si je commençais à m'emmêler les pinceaux dans mon propre domaine, Ewen ne devait rien comprendre le pauvre. Ou, comment passer pour un patron indigne. Franchement, c'était du grand art là. « Je me pencherai sur la question. » conclus-je avec un sourire du genre professionnel mais pas trop. Juste assez pour montrer que je ne m'en fiche pas du tout, pas assez pour dire que ce n'est pas très grave, et que je gère quand même. « Un café ? » J'aurais peut-être dû lui demander plus tôt...Décidément, je faisais tout à l'envers aujourd'hui.

Mine de rien, rester là à parler de tout et de rien avec Ewen, telles des mégères prenant le thé, ça empiétait sur mon temps de travail. J'étais le premier à remettre au travail les employés qui attendaient que ça passe, et voilà que je faisais complètement le contraire. Et pourtant...Rien n'aurait pu subitement me faire changer d'avis. C'était Ewen, tout simplement...J'avais toujours l'impression qu'il pouvait m'échapper d'un instant à l'autre, ce pour quoi je préférais qu'il reste. Et vu la pluie, il n'avait raisonnablement pas trop le choix. Pour une fois que j'aimais une intempérie. Pour l'instant on allait surtout se poser un peu, et j'avoue que j'étais assez curieux de goûter ce fameux brownies. Je plaisantais gentiment sur d'éventuels éléments malheureusement mis en trop. En réalité, c'était surtout que je me serai senti idiot à manger seul à côté d'Ewen. C'était bien plus sympa à deux. Ce dernier me fixait d'ailleurs, sans avoir l'air de comprendre...J'aurais fait un flop ? Le doux sourire qui s'afficha sur son visage après me prouvait le contraire. « Seulement les ingrédients nécessaire » Le contraire m'aurait étonné. « Me voilà rassuré alors » répondis-je avec un sourire amusé. Notre discussion dériva sur ce qui est à proprement dire, la pluie et le beau temps. Plus de la pluie en fait, qui semblait même redoubler d'intensité au fil des minutes. Cela faisait longtemps qu'il n'y avait pas eu une telle pluie à Phoenix d'ailleurs, mais contrairement à d'habitude, aujourd'hui elle ne tombait pas trop mal. Je comprenais tout à fait que le jeune homme n'ait pas réellement envie de repartir sous cette pluie battante, alors il pouvait bien rester, ça ne me dérangeait pas le moins du monde. S'il voulait réellement attendre que ça se calme, il en avait encore pour un bon moment, et je ne me gênais pas pour le lui signaler, histoire de le taquine. Vu le regard qu'il me lança, il ne semblait pas s'être attendre à ça, ce qui agrandit un peu plus mon sourire. Pour moi, c'était très drôle, de le voir pris au piège de la sorte. Oh bien sûr, je ne comptais pas le séquestrer jusqu'à ce que les gouttes cessent. S'il voulait partir avant, il en avait tout à fait le droit. « Et bien, on verra ça plus tard » Conversation sur le temps close. Ce qu'il m'amusait ce petit...

Très vite, le jeune homme eut sans doutes d'autres problèmes en tête, comme son tee-shirt trempé qui ne cachait au final pas grand chose. Personnellement, ça ne me dérangeait pas, même si je m'abstins de commentaires, faisant même mine de ne rien avoir vu, ce qui n'était pas le cas. Je ne laissais rien paraître, m'enfin, il n'était pas dupe le gamin. Je reportais mon attention plutôt sur les serviettes que je disposais sur la table, suivies des parts de brownies. Ewen opta pour le changement de sujet complet, afin de faire diversion. La question de savoir combien j'employais de personnes me mit un peu en difficultés. On ne me demandait ça que très rarement, et à chaque fois, tout était répertorié sur informatique. Il était vrai que ne pas savoir ça, c'était un peu honteux de ma part. Pour ma défense, nous avions fait une restructuration il y a peu de temps, et encore aujourd'hui on recrutait. J'eus une petite pensée pour le dossier qui attendait paresseusement sur mon bureau...Chose remise pour le lendemain, ou peut-être la soirée, étant donné que je n'avais rien d'important à faire. Néanmoins, je tentais de sortir une réponse correcte au jeune homme, tout en promettant de me pencher sur la question dès que possible. « Il doit y avoir beaucoup de monde, heureusement que tu ne gère pas tout, tout seul » Tout seul ? C'est simple, je ne saurai même pas gérer la moitié de l'entreprise. Je ne pouvais pas me concentrer sur tous les services à la fois. J'étais censé être le grand patron, d'accord, mais il fallait bien des rédacteurs en chef et des chefs d'édition par exemple, pour assurer le bon déroulement du journal. « Tu crois pas si bien dire...La plupart, même les plus anciens, sont incapables de travailler si tu ne leur dis pas à la lettre quoi faire. Alors si j'étais seul, autant dire que je n'en verrais pas le bout. » C'était dommage, mais pourtant ça restait un reproche qu'on faisait souvent. Certain attendaient les bras croisés, jusqu'à ce qu'on leur dise directement en personne quel sujet ils devaient traiter, de quelle manière, et pour quel but. Aucune initiative, et c'était bien dommage.

« Ce n’est pas nécessaire, tu sais » Je lui souris. D'accord, je souriais beaucoup avec lui, mais j'y pouvais rien moi, il me rendait comme ça. Ça en faisait presque peur. Je lui proposais un café, pour accompagner les brownies, qui, mine de rien, attendaient toujours sur la table. On papotait quand même beaucoup, en fait. « Oui j’en veux bien un merci, avec du lait si tu en as » « Je t'apporte ça. » Je me levais, et pris la direction de la porte. Je passais beaucoup de temps dans mon bureau, ce qui fait que j'avais fini par l'aménager d'une façon un peu plus confortable, mais pas au point d'avoir la machine à café à volonté non plus. Je me dirigeais rapidement vers la salle de pause, qui de toute évidence, portait bien son nom. Je ne m'attendais pas tellement à y voir quelqu'un à cette heure-ci. Je ne voulais pas trop faire attendre Ewen, non pas que je craigne de le laisser seul dans mon bureau, mais je me doutais bien qu'il ne resterait pas non plus toute l'après-midi, pluie ou pas, alors autant gagner du temps. J'aurais bien pu demander à ma secrétaire, mais honnêtement, elle avait autre chose à faire. Je n'étais même pas du genre à demander ça aux stagiaires, c'est dire. Je mis la machine à café en route, l'écoutant gargouiller en faisant couler le café dans les tasses. Je rajoutais un peu de lait dans le café d'Ewen, comme il l'avait demandé, attrapait un sachet de sucre des fois qu'il en veuille, et retournait sur mes pas pour le rejoindre.

Quand je revins, il n'avait pas bougé de sa place. Je posais les deux tasses sur la table, et m'installais à nouveau à côté de lui. Ils étaient encore brûlants, à tel point qu'on voyait la fumée s'élever au dessus. Au moins ça le réchaufferait. Ewen ne perdit pas de temps à recommencer avec ses question d'ailleurs. « Ton travail consiste à quoi alors, exactement ? » Je bus une petite gorgée de café, essayant de ne pas me brûler. « Principalement, je supervise. Je vérifie que tout se passe correctement au sein du journal. Je m'occupe de tout ce qui est administratif aussi. J'aide aussi dans le rôle de rédacteur en chef, donc en quelques mots, trouver les sujets, la façon dont ils vont être exposés. Je m'occupe de tout ce qui est extérieur au journal aussi, par exemple pour les recrutements. Enfin bref, tout un tas de choses. » J'allais quand même me taire parce qu'après, il pourrait penser qu'il me dérange dans mon travail. « Euhm… si tu veux parler d’autres chose, tu le dis. Je suis juste un peu curieux » C'est vrai que toutes ses questions avaient été centrées autour de mon boulot. Ça ne m'ennuyait pas trop d'en parler, contrairement à ce qu'il pouvait croire, mais j'aurai bien aimé qu'il parle un peu de lui aussi. Il m'intéressait quand même. C'était un jeune homme intéressant et intéressé, que demander de mieux ? « J’appellerai pas ça juste un peu curieux, mais dans le métier c'est une qualité. » Qualité qui manquait indéniablement à la plupart des personnes qui souhaitaient postuler dans le journal d'ailleurs. Enfin bon, il fallait vraiment que j'arrête de penser boulot avec Ewen sinon on était pas sorti de l'auberge.

Je reportais mon attention sur les parts de brownies posées sur les serviettes. Après tout au départ, il était là pour ça... Et peut-être pour autre chose, qui sait. Quand même curieux de savoir ce que ça donnait, je mordis dans le coin du morceau. La première chose qui me vint à l'esprit, était qu'il n'avait pas exagéré : son brownies était tout simplement excellent. Meilleur en tout cas que tout ceux qu'il m'avait été donné de goûter. Je regardais le jeune homme, qui attendait sûrement mon verdict. « Tu avais raison ; c'est délicieux. »

A y voir de plus près, c'était assez curieux la façon dont je baissais ma garde dès qu'il s'agissait d'Ewen. Vu la façon dont c'était parti, toute personne me connaissant se serait bien douté que si je continuais d'agir ainsi envers le jeune homme, c'était surtout pour tirer mon coup au final. Ce que j'aurai sûrement fait à l'accoutumée mais voilà, là, ce n'était pas pareil. Je pensais pouvoir affirmer que je m'étais attaché au brun. C'était tout ce qu'il y avait de plus inconditionnel me connaissant, pourtant c'était ainsi. Au moment présent, je prenais un certain plaisir à l'avoir près de moi, à pouvoir passer un peu de temps avec lui. Au niveau relationnel le concernant, j'avançais dans un vrai brouillard. Je ne savais pas tellement quoi attendre de lui, le contraire étant sûrement vrai aussi. Ce que je voulais à coup sûr pour le moment, c'était entrer dans sa vie. Bête à dire, mais je le voyais ainsi...Et si nous avions déjà gardé contact après l'incident du bar, et puis qu'en plus il était venu de lui-même pour me faire une telle surprise, je devais déjà être bien avancé...Pour le moment j'écoutais plutôt ses questions, qui avaient toutes tendance à tourner autour de mon boulot. Je comprenais que ça puisse l'intriguer, et dans un sens, je trouvais cette curiosité plutôt attendrissante. Je lui en fis la réflexion, et eus au passage envie de sourire en voyant le sien s'étirer doucement. Moi qui m'attendais à ce qu'il baisse encore la tête en se disant désolé pour son indiscrétion, ou quelque chose du genre...Ewen ne semblait pas avoir confiance en lui. Pourtant, il avait clairement de quoi être fier de la personne qu'il est. Du moins, c'était mon point de vue vis à vis de lui.

Je portais finalement mon attention sur ces parts de brownies, qui n'attendaient que d'être mangées. A la base Ewen était juste venu pour me les donner, mais définitivement, j'aimais trop l'avoir avec moi pour m'intéresser d'abord au gâteau, aussi délicieux soit-il. Dire que la plupart du temps, je détestais qu'on m'interrompe dans mon travail...C'était bien une première que je sois plus qu'heureux à l'idée de passer quelques temps à me défiler pour l'après-midi. Je songeais aussi au fait qu'à l'occasion, il faudrait que je m'accorde quelques vacances. Doucement, je goûtais enfin à ce gâteau chocolaté qui semblait narguer mon estomac. Le verdict n'en fut que très positif, ce qui sembla rassurer le jeune homme sur le moment. « Tant mieux. Si t’en veux d’autres, tu n’auras qu’à me le dire, je pourrais en faire plus. » J'eus un sourire amusé à cette idée. Déjà qu'il m'avait mis beaucoup de parts ici, si en plus il tenait absolument à m'en refaire, sachant que je me voyais mal lui refuser quoi que ce soit, tant que ça lui faisait plaisir. Oh, je savais qu'il voulait bien faire, alors je trouvais ça plus touchant qu'autre chose. « Tu tiens tellement à m'engraisser?! » lui demandais-je, taquin. Après un régime brownies, si je ne me décidais pas à contenter un peu avec du sport, la balance finirait par faire la tête. J'espérais juste qu'il ne le prenne pas trop mal. Après tout, il n'y avait rien de méchant. Et justement, ça ne sembla pas l'arrêter, bien au contraire. « S’il y en a trop, tu pourras en partager avec tes amis… » C'était une solution aussi. M'enfin pour le moment, Ewen était surtout en train de s'emmêler les pinceaux, ce que je trouvais tout aussi adorable. Je bus une gorgée de café en le regardant doucement. « T'en fais pas va. »

« Je voulais te remercier pour ce que tu as fais… la fois au café. T’étais pas obligé d’intervenir. » Sa part de brownies semblait être bien intéressante d'un coup. Je ne voyais pas tellement pourquoi revenir sur le sujet, pour moi ça avait été tout à fait normal. Ce mec avait la vraie réputation du type lourd et puis, Ewen avait tellement l'air perdu qu'il ne pouvait pas savoir dans quel guêpier il s'était fourré. Automatiquement, je repensais au moment où le soir même, je l'avais embrassé sur le perron...J'aurai aimé savoir ce qu'il en pensait. C'était pas la meilleure idée que j'aie pu avoir sur le moment, et pourtant je n'arrivais pas à regretter. J'en avais profité oui, mais aujourd'hui c'était passé. Peut-être cela faisait parti des sujets qu'il vaut mieux ne pas remettre sur le tapis. Je secouais la tête. « T'as pas à me remercier, c'est normal. Surtout avec ce type, crois-moi, t'étais pas prêt d'avoir la paix. » J'admettais plus ou moins être un habitué de l'endroit mais bon, c'était pas bien important. Je n'étais pas du genre à jouer les grands justiciers, sauf que cette fois-ci, tout avait été différent. De plus, pour que je revienne finalement prendre de ses nouvelles quelques jours plus tard...Tout s'était enchaîné trop vite pour que je puisse comprendre, mais en tout cas, c'était la première fois que j'éprouvais une telle chose vis à vis d'un homme. Voir où ça mènerait, c'était une chose que j'appréhendais étrangement. « Je sais que te faire ces brownies ne l’égale pas, donc si tu veux autre chose, je pourrais surement le faire. Ça me ferait plaisir » Il était buté le gamin. Ce que j'avais fait me semblait tellement normal que...je ne voyais pas trop pourquoi il y aurait un besoin ressenti de me remercier. « Si tu veux vraiment me remercier, la prochaine fois que tu veux me faire une surprise, assure toi que tu ne risques pas de choper la crève au passage, ce sera bien suffisant. » Je me levais pour m'avancer ensuite vers la fenêtre, d'où la pluie continuait de dégouliner à tout va. Quel temps de chien...Enfin, vu la grosse chaleur qui avait plané sur la ville durant plusieurs jours, il fallait bien que ça pète. Au moins ça rafraîchirait l'atmosphère. Je me retournais vers Ewen. « Je te raccompagnerai chez toi ; ça semble pas prêt de s'arrêter cette pluie. »