20h00. Cet endroit me rend folle. Je ne peux pas y rester une seconde de plus. Non, vraiment impossible. Les odeurs de joints me font tourner la tête. La peinture verdâtre me donne la nausée. Je suis là, à fixer les murs nus qui encadrent cette pièce presque vide. Me posant les éternelles mêmes questions que chaque jour. Ce soir comme tous les soirs, je sors. J'ai besoin de me fondre à nouveau dans la foule et oublier. Mes mains tremblantes tentent de prendre appui sur le sol pour me lever. Je m'adosse au mur et me dirige vers la salle de bain en titubant. Je n'ai pas dû manger depuis 8 heures ce matin, je n'ai pas faim. Je vais simplement me préparer et m'en aller. Je contourne la chose qui me sert de colocataire. En fait, voilà l'état actuel des choses. Ce qui devrait être une présence humaine, une personne, se révèle être aussi bavarde, active, et présente qu'un pot de fleur. Je ne fais même plus attention à lui. En trip H24, cela doit faire plusieurs jours que je ne lui ai pas adressé la parole et à vrai dire, ça ne me manque pas. Parfois seulement, il bouge. Il me tend une bouteille souriant comme un débile profond, le regard vide. Je porte la bouteille à la bouche et respire l'odeur. Une, deux puis trois gorgées qui m'aideront à sortir d'ici. La salle de bains est miteuse, mais je peux quand même m'entre apercevoir dans le miroir pour me couvrir de fond de teint. Je suis tellement pale, parfois des reflets bleutés soulignent mes yeux. Je passe un jean, un haut décolleté noir et des talons noirs. Mes cheveux blonds retombent en cascade sur mes épaules. Chaque mois, je me bats pour payer ma drogue, mais j'arrive toujours à trouver un peu d'argent pour les fringues en faisant des petits boulots... Sans un mot, je claque la porte. J'entends le cliquetis du verrou et dévale les escaliers manquant de peu une chute à la troisième marche. - Merde! Je me redresse et repars d'un pas incertain.
22h30 Me voilà dans les rues de Phoenix. Il fait sombre, la nuit tombe. J'ai passé plusieurs minutes cachée dans un coin de rue avec mon raï de coke et un type qui est dans le même cas que moi. Je me sens bien. Bien mieux. Les lampadaires sont brillants, la lune est luisante et les gens ne semblent plus n'être que des ombres flottant le long des trottoirs. Les voitures ne sont plus que de grosses taches noires dont les yeux me fixent. Nous sommes éblouis. Je pose ma main sur l'épaule du type pour me relever. Je lui adresse un vague signe. Je m'engage dans les rues peuplées de Phoenix. Je sais très bien où je vais, ce que je fais. Une femme habillée comme une catin va pour me dépasser sur le trottoir. Elle me heurte l'épaule d'un coup violent et trace sa route sans prêter attention. Je m'arrête fait demi-tour.
- Hey la pét*sse ! T'as un problème? T'as pas assez de gueule pour t'excuser ? Elle me regarde et s'en va.
- C'est ça, casse-toi !
Je pars furieuse et j'arrive devant le Phoenix Inn. Du monde essaye de rentrer. J'affiche mon plus beau sourire. A peine forcé. Plus que forcé. Le videur me regarde. Je lui adresse un clin d'œil. Je suis autorisée à passer. Je scrute le bar. Je crois reconnaitre un type. Je ne sais pas bien d'où je le connais... Je vais m'asseoir au bar à l'opposé de lui. L'ayant en face de moi. Mais au moins je suis sure de pouvoir me rappeler qui c'est. Je commande un whisky coca. La seule boisson de ma soirée vu le budget que j'ai... Je fixe l'homme. Je ne vois pas tr... Ah ça y'est ça me revient. Il m'a ramassée sur les pavés... Je tourne la tête pour finalement me tourner complètement faisant dos au bar et à l'homme. Pourvu qu'il ne m'ait pas vu...